Samedi 28 juin
Thème de la journée : La famille Voyer d’Argenson et son entourage : Parents, artistes et relations.
Nous serons heureux de vous accueillir à cette troisième édition de la Journée d’histoire que nous avons voulu toujours plus passionnante. De brillants conférenciers, d’origines diverses et prestigieuses, vous feront partager le plaisir du siècle des Lumières et de la Belle Epoque en compagnie de la famille Voyer d’Argenson.
Nous tenons à souligner la venue exceptionnelle des Etats-Unis de M. Paul Miller que les Français ont pu découvrir dans l’émission de Stéphane Bern, Secrets d’histoire « Gatsby et les magnifiques », relatives aux grandes fortunes américaines de la Belle Epoque, le 1er octobre 2013.
Programme de la journée :
10h : Discours d’accueil par M. Sydney Abbou, Propriétaire du château des Ormes.
10h15 : Les d’Argenson et le théâtre par M. Dominique Quéro, Professeur de Littérature française, Université de Reims.
La présence au château des Ormes d’une salle de comédie au XVIIIe amène à revenir sur ces grands amateurs de spectacles que sont, à l’instar de leurs contemporains, le comte et le marquis d’Argenson, ainsi que leur fils respectifs, les marquis de Voyer et de Paulmy. Voyer disposait ainsi de sa propre salle de spectacles à son château d’Asnières. Non seulement spectateurs et lecteurs, ils furent aussi, à l’occasion, acteurs voire auteurs de pièces de théâtre.
11h : Entre bibliophilie et bibliographie. Le marquis de Paulmy et la construction d’une bibliothèque universelle par Mme Eve Netchine, Directrice adjointe, Bibliothèque de l’Arsenal, Paris.
La constitution d’une des plus riches bibliothèques de son temps a été pour le marquis de Paulmy le travail d’une vie. Loin de s’arrêter à la reproduction de la tradition bibliophilique dont il est l’héritier, Paulmy a élaboré à la bibliothèque de l’Arsenal une œuvre originale qui fit de son immense collection l’un des foyers d’une activité dont les livres furent l’instrument exigeant et visible mais non le but unique et ultime. Etudier de manière croisée l’œuvre littéraire, la correspondance et la collection du marquis permet de caractériser le modèle bibliophilique élaboré par Antoine-René de Voyer d’Argenson.
11h15 : Julien-David Leroy, conseiller artistique du marquis de Voyer par M. Philippe Cachau, Docteur en histoire de l’art, Bayonne.
Fils de l’horloger du roi Julien Leroy, Julien-David Leroy (1724-1803) fut l’un des grands anticomanes et promotteurs du goût « à la grecque » dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Auréolé de son séjour en Grèce en 1755, il est l’auteur en 1758 du fameux recueil Les ruines des plus beaux monuments de la Grèce. Soucieux de demeurer à la pointe du goût, le marquis de Voyer s’attacha ses conseils pour ses nouvelles résidences de Paris et des Ormes. C’est ce rôle, demeuré inédit jusqu’ici, qui sera révélé.
Pause-déjeuner
14h : Mathieu Bauve, menuisier en siège des Voyer d’Argenson par M. Christian Baulez, Conservateur général honoraire, Château de Versailles.
Mathieu Bauve, dit aussi Mathieu de Bauve, reçu maitre en 1754, est un menuisier en siège parisien réputé dont la vie présente encore de nombreuses zones d’ombre. Auteur des sièges du grand salon de l’hôtel de Voyer d’Argenson, dit Chancellerie d’Orléans, dans les années 1760, dont les fameuses bergères « à la grecque » acquises en 2012 par les Archives nationales, Mathieu Bauve travailla, outre les D’Argenson, pour de nombreux membres de la haute société du XVIIIe dont Machault d’Arnouville ou le duc de La Rochefoucault. C’est l’activité et quelques modèles de sièges de ce grand menuisier qui seront présentés.
14h45 : Une rencontre internationale : le patrimoine des Voyer d’Argenson et le goût du luxe à la Belle Epoque par M. Paul Miller, Conservateur, Preservation Society of Newport County (Etats-Unis).
Le souvenir des fastueuses demeures érigées par Marc-René de Voyer d’Argenson, marquis de Voyer, au XVIIIe par Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne et Charles De Wailly, a inspiré à la fin du XIXe siècle un ensemble de belles maisons construites dans un style « Argenson » entre la France et l’Amérique. Le château The Elms (Les Ormes, en anglais) à Newport, résidence d’été du magnat du charbon américain Edward Julius Berwind, bâtie en 1897 par l’architecte Horace Trumbauer et complété en 1901, imitation du château d’Asnières-sur-Seine, est de celles-là : http://www.newportmansions.org/explore/the-elms.
15h30 : Au galop d’un cheval : créations architecturales et paysagères de Charles Constantin au château de La Lorie sous l’influence de l’Angleterre et des Ormes par M. Guy Massin Le Goff et M. Etienne Vacquet, Conservateurs, DRAC Pays de la Loire, Angers.
Propos non communiqué.
16h15 : Débat
17h (grand salon du château) : « Discours sur la nécessité d’admettre des étrangers dans les sociétés littéraires ». Discours d’Antoine-René, marquis de Paulmy, à l’Académie royale des Sciences et Belles Lettres de Berlin du 2 février 1747 par Isabelle Fournier, comédienne, Paris.
Parallèlement aux conférences, différentes sociétés savantes de Poitou-Charentes et de Touraine seront présentes :
–Centre châtelleraudais d’histoire et d’archives http://ccha.fr/
–Amis du pays lochois http://www.amispayslochois.fr/
–Société des Antiquaires de l’Ouest http://www.sao.asso.fr/
–Société historique de Parthenay et du pays de Gâtine http://sh2pg.fr/
–Société historique et scientifique des Deux-Sèvres http://www.fshds.fr/
–Société historique et archéologique de la Charente http://www.sahc-charente.org/
Compte-rendu de la journée :
Malgré un temps maussade, la journée d’histoire 2014 a connu un beau succès avec plus de 110 personnes recensées en salle, sans compter les personnes déambulant entre les stands des associations présentes.
Outre les personnalités conviées, la journée a été marquée par la présence de M. François-Louis de Voyer d’Argenson qui succédait ainsi à son père Jean-Denis, présent l’an dernier. Rappelons que M. François-Louis de Voyer d’Argenson fut parmi les premiers intervenants de la journée d’histoire des Ormes en 2012.
La journée s’est ouverte par le beau et long discours du maître des lieux, M. Sydney Abbou, qui a remercié les participants de leur présence et rappelé ses intentions pour le château des Ormes à travers ces journées d’histoire.
S’en suivit la conférence de M. Dominique Quéro, professeur de Littérature française à l’Université de Reims, qui nous a évoqué le goût prononcé du théâtre chez les D’Argenson, toutes générations confondues, depuis le début du XVIIIe.
Hormis les ouvrages de théâtre qui figuraient, comme il se doit, dans leurs biblothèques respectives, et leur présence assidue aux spectacles donnés dans les salles de la capitale, voire ceux des foires Saint-Germain et Saint-Laurent (auxquels le marquis René-Louis d’Argenson, le célèbre mémorialiste, dit avoir assisté tandis que son frère Marc-Pierre, dit « D’Argenson la guerre », s’y rendait incognito en compagnie des comtes de Maurepas et de Caylus), tous pratiquaient l’art de la représentation que cela soit dans les salles de leurs hôtels ou châteaux ou celles de leurs amis.
Cette intervention fut riche en révélations sur cet aspect méconnu des membres de cette illustre famille au XVIIIe siècle.
Conférence de M. Dominique Quéro.
Conférence de Mme Eve Netchine
Il fut ensuite question d’architecture à travers l’évocation de la correspondance inédite de Julien-David Leroy, éminent théricien de l’architecture de la seconde moitié du XVIIIe siècle, avec le marquis Marc-René de Voyer d’Argenson, dit le marquis de Voyer.
Conférence de M. Philippe Cachau
Donnée par M. Philippe Cachau, docteur en histoire de l’art et coordinateur de la journée, cette conférence révéla des aspects totalement méconnus de la personnalité de Leroy à qui l’on doit, à travers son fameux ouvrage Ruine des plus beaux monuments de la Grèce publié en 1758 et réédité en 1770, la redécouverte des monuments de la Grèce antique et le goût des grecqueries dans les arts, la mode, le mobilier, etc.. au XVIIIe et au début du XIXe siècle.
Souvent négligé par les historiens d’art, le marquis de Voyer apparait assurément comme le grand protecteur de l’architecte, les deux hommes étant liés par une profonde amitié et de nombreux points communs. En échange de ses recommandations et de sa protection, Leroy prodigua au marquis ses conseils éclairés dans ses chantiers de Paris et des Ormes afin qu’ils demeurassent, comme toujours avec le marquis, à la pointe du goût.
La pause-déjeuner fut l’occasion, autour d’un somptueux buffet, de nombreux échanges autour des communications de la matinée.
Le public put en outre, cette année, découvrir les activités et les publications des associations de Touraine et de Poitou-Charentes présentes sous la grande tente disposée devant l’orangerie. Nous les remercions toutes de leur aimable participation, contribuant assurément au succès de la manifestation.
Comptoirs des associations présentes devant l’orangerie
Conférence de M. Christian Baulez
Dans la continuité de cette communication et de l’émission de Stéphane Bern « Secrets d’histoire » d’octobre 2013 où il avait figuré, M. Paul Miller, conservateur à la Preservation Society de Newport, nous présenta de beaux exemples de décors XVIIIe installés aux Etats-Unis, principalement à New York et à Newport, par les grandes fortunes américaines de la Belle Epoque et qu’il qualifia opportunément de « style Voyer d’Argenson ».
La personnalité du fameux antiquaire et décorateur parisien Jules Allard, d’origine tourangelle, fut au coeur de la communication, lequel n’hésitait pas à abuser de la naïveté de ses riches commanditaires en leur présentant les décors vendus comme provenant de résidences de Mme de Pompadour ou de Louis XV, en l’occurence du château d’Asnières, demeure fameuse du marquis de Voyer aux XVIIIe et XIXe siècles.
Allard est bien connu pour la commercialisation, en Grande Bretagne (Cliveden) et aux Etats-Unis, des décors de ce chateau (boiseries, cheminées, sculptures) réalisés par le grand ornemaniste rocaille Nicolas Pineau et le non moins célèbre Guillaume II Coustou. M. Miller nous fit une révélation concernant les grisailles du grand salon d’Asnières par le peintre du roi Jean-Baptiste-Marie Pierre dont nous réservons la primeur aux lecteurs des prochaines annales de la journée d’histoire (à paraître début 2015).
Conférence de M. Paul Miller de Newport (USA)
La journée s’acheva par la non moins passionnante intervention de M. Guy Massin-Legoff, conservateur en chef du patrimoine du Maine-et-Loire et son assistant, M. Etienne Vacquet, qui nous évoquèrent les liens entre le château des Ormes et celui de la Lorie, situé au nord d’Angers, au XVIIIe siècle via la correspondance entre Charles-Félix Constantin, marquis de la Lorie, son amie Lady Rivers et le marquis de Voyer. Correspondance conservée dans la descendance des Constantin de La Lorie à Vesoul.
M. Vacquet s’attacha dans un premier temps à l’histoire et à l’évolution architecturale du château de la Lorie. Il insista particulièrement sur la décoration de la salle à manger et du salon de marbre dans les années 1780, très probablement influencés par les réalisations antérieures du marquis de Voyer aux Ormes (années 1770 et début des années 1780). Si la salle à manger a disparu, le salon tout en marbre d’esprit louisquatorzien, réalisé par l’architecte Jean-Sébastien Leysner en 1780, subsiste et demeure exceptionnel en son genre.
Les liens entre les Ormes et la Lorie n’étaient pas uniquement esthétiques mais aussi équestres, à travers leurs haras respectifs et leurs échanges avec l’Angleterre. La personnalité, la correspondance et la venue de Lady Rivers, Penelope Atkins, dans ces deux résidences a été abordée par M. Massin-Legoff.
Conférence de MM. Etienne Vacquet et Guy Massin-Legoff
Les communications furent suivies d’une séance de questions aux intervenants.
Débat entre M. Philippe Cachau et M. Paul Miller
En guise de conclusion de cette brillante journée, le public fut conviée, dans le grand salon central du château, à la représentation de Mme Isabelle Fournier, comédienne à Paris, qui déclama, dans une belle scénographie, le Discours sur la nécessité d’admettre des étrangers dans les sociétés littéraires donné par Antoine-René, marquis de Paulmy, à l’Académie royale des Sciences et Belles Lettres de Berlin en 1747.
Représentation de Mme Isabelle Fournier dans le grand salon
Nous remercions tous les participants, intervenants et associations, de leur aimable présence et d’avoir contribué, par leur érudition, au succès et à la qualité de la manifestation.
Nous invitons le public à venir assister, toujours plus nombreux, à la quatrième édition de la journée d’histoire des Ormes qui aura lieu le samedi 27 juin 2015.
Les communications présentées à l’occasion de l’édition 2014 seront publiées dans le tome III des Annales de la journée d’histoire du château des Ormes (à paraître début 2015).
De gauche à droite et de haut en bas : François-Louis de Voyer d’Argenson, Etienne Vacquet, Philippe Cachau, Christian Baulez, Paul Miller, Dominique Quéro, Eve Netchine, Mme et M. Abbou, Guy Massin-Legoff.
Clichés : Alain Bonnet.